Bienvenue dans le monde du biosourcé

Si l’agriculture fournit une série de ressources renouvelables (viande, lait, céréales et oléagineux et protéagineux, pâturages, coproduits industriels, etc.), utilisées principalement pour nourrir les populations, il existe d’autres usages et valorisations de ces ressources. Et ils peuvent prendre différentes formes!

C’est ce que les enseignants-chercheurs et étudiants d’AgroParisTech proposent aux visiteurs du Salon de l’Agriculture jusqu’au 3 mars de découvrir avec leur « maison d’origine biologique ». Ici, la vaisselle (en bambou), les flacons (en bioplastique), les contenants (en amidon), les produits d’hygiène, d’entretien et de beauté (issus de végétaux), mais aussi le tapis (issu de micro-organismes), la peinture (à base sur les algues), matériaux de construction (en bois, chanvre et miscanthus) ou isolants (en herbe), fournitures de bureau (en liège), vêtements (en chanvre et lin) ou jouets (en bois ou maïs), tout, absolument tout, est fabriqués à partir de matières premières d’origine biologique.

Aujourd’hui, ces produits peuvent avantageusement remplacer leurs homologues à base de pétrole, qui servent notamment à fabriquer des objets en plastique. Toutes ces créations d’origine biologique, et donc beaucoup plus durables, sont dues à la bioéconomie, un secteur prometteur dont le développement doit être soutenu.

Une approche globale

Ce qu’on appelle la bioéconomie n’est pas l’économie de marché de l’agriculture biologique, ni celle des biodégradables, mais l’économie basée sur l’utilisation des ressources renouvelables. Nos voisins anglo-saxons utilisent également le terme plus éloquent de bioéconomie pour désigner ce secteur.

La bioéconomie englobe toute une gamme d’activités : de la production de matière première (ou biomasse) – qu’elle soit agricole, animale, forestière, marine ou algale (et donc renouvelable) – à sa transformation et son utilisation de diverses manières, comme l’alimentation (humain et animal), l’énergie, les matériaux ou encore les molécules pour l’industrie.

La bioéconomie s’intéresse ainsi aux multiples usages et finalités de la biomasse renouvelable. On parle ici de produits et molécules « biosourcés », par opposition à ceux, encore trop nombreux, d’origine « pétrosourcée ».

La valorisation de cette matière première doit être considérée dans sa globalité, dans la logique de l’économie circulaire : cela nécessite de trouver de nouvelles façons de valoriser les coproduits industriels et autres biodéchets (dont les déchets ménagers). Le concept de bioéconomie pose ainsi la question de la production agricole, dans une vision qui part des usages pour revenir aux itinéraires techniques agricoles. La biomasse produite et valorisée doit respecter un cahier des charges raisonné alors que, trop souvent, l’agriculture se pense comme une fin qui profitera à d’autres.

La bioéconomie en France

Alors que Bruxelles a lancé en 2012 une stratégie de déploiement d’une bioéconomie européenne et que certains pays nordiques sont déjà bien avancés dans ce domaine, la France s’est récemment penchée sur la question, adoptant en février 2018 une stratégie nationale en la matière.

Dans cette feuille de route, la bioéconomie française vise à :

« […] assurer la sécurité alimentaire et des conditions de vie durables pour les générations actuelles et futures en préservant les ressources naturelles et les fonctions des écosystèmes de l’environnement ; être efficace, résilient et circulaire, productif de manière durable ; être citoyen et ancré dans le territoires, et contribuer au développement de la valeur économique et de l’emploi ; apporter des solutions innovantes, efficaces et accessibles capables de satisfaire la diversité des besoins humains ».

Aujourd’hui, environ 1. 9 millions de personnes en France sont directement impliquées dans des activités liées à la bioéconomie, avec un chiffre d’affaires de plus de 300 milliards d’euros. Les domaines concernés sont nombreux : agriculture, agro-alimentaire, sylviculture, pêche, construction, textile, énergie, transports, industries chimiques, cosmétiques et pharmaceutiques, etc.

La France est particulièrement active dans le domaine de la chimie verte, des biomatériaux et des bioénergies (méthanisation, biocarburants par exemple). Eurek’Alias, lauréat des premiers « Trophées de la bioéconomie » (dans la catégorie bioénergie), produit ainsi de l’électricité et du biométhane par un procédé de méthanisation agricole pour alimenter la voiture de l’agriculteur. Gâtichanvre, lauréat dans la catégorie biomatériaux, développe une gamme d’isolants écologiques à base de chanvre, une activité qui permet de diversifier les revenus des agriculteurs.

Une industrie en croissance

Mais beaucoup reste à faire, notamment en matière de formation, de recherche et de communication.

L’immense potentiel de la bioéconomie n’est accessible que s’il est intégré à des méthodes d’ingénierie et de conception appropriées. Ces méthodes et outils se réinventent, intégrant à la fois des concepts issus des méthodes high-tech (capteurs, biologie fondamentale, numérique, intelligence artificielle) et de l’innovation frugale, c’est-à-dire des solutions pragmatiques, technologiquement simples, mais efficaces et du cœur, pour réinventer des solutions. aux systèmes agricoles et industriels.

La bioéconomie est par nature pluridisciplinaire : environnement, agronomie, agriculture, sélection végétale, biologie végétale, agro-alimentaire, procédés, santé, biotechnologies, chimie verte, sciences humaines et sociales, numérique, modélisation, etc. Ici, le rôle d’AgroParisTech se révèle être fondamentale dans la formation des futurs cadres de la bioéconomie, pour des métiers qui bien souvent n’existent pas encore ou vont faire face à des bouleversements et des mutations difficiles, voire impossibles, à prévoir.

Mieux expliquer les bénéfices de la bioéconomie

La bioéconomie est encore peu connue et sa croissance est souvent pénalisée par le contexte économique. Mettre l’accent et surtout prendre en compte les externalités positives de la bioéconomie -telles que la création et la relocalisation d’emplois et le maintien de la compétitivité, la réduction de la dépendance aux ressources non renouvelables, l’atténuation et l’adaptation au changement climatique, la sécurité alimentaire et des ressources la gestion durable, etc. – en matière de produits pétroliers est un critère important de réussite.

Recommandée dans le plan d’action du ministère de l’Agriculture, la mise en place d’un label « produit d’origine biologique » au niveau européen pourrait aider au développement de la bioéconomie. Car les consommateurs ne sont pas encore suffisamment éduqués et informés, tant sur le potentiel de la bioéconomie que sur ses possibles bénéfices en termes de création d’emplois, de développement des territoires et surtout de prise en compte de l’environnement.

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