Forcément associé dans la conscience collective aux plages de nos vacances, le sable est pourtant un objet de désir bien au-delà du tourisme. Après l’eau, c’est la deuxième ressource minérale exploitée par l’homme!
Résultat de l’altération d’une roche mère par des agents, le plus souvent météoriques – eau, vent, action des cycles de gel et de dégel – sa nature dépend donc de son origine : il existe autant de sables différents que de roches dans le monde! planète! Trois critères relatifs à ses grains permettent de la caractériser : nature (minérale ou organique), forme (morphoscopie) et dimensions (granulométrie). Ces deux derniers dépendent de la durée du transport et de ses agents de transport : le vent et l’eau, qui peut être la pluie, le fleuve ou la mer.
Omniprésent dans notre quotidien, même si nous ne nous en rendons pas compte, le sable entre notamment dans la composition du béton, son premier consommateur. Cependant, l’exploitation et l’utilisation de cette ressource ne sont pas exemptes de conséquences environnementales, économiques, sociales et culturelles.
Des dizaines de milliers d’années pour le produire.
En plus des plages et des fonds marins, nos terres regorgent également de sable. En France, les bassins sédimentaires d’Aquitaine et de Paris recèlent sous nos pieds de vastes formations sableuses. Cette présence sur le continent, en surface ou sous terre, provient d’un milieu passé où le transport et le dépôt de sédiments sableux étaient possibles.
Il faut des dizaines voire des centaines de milliers d’années à la nature pour produire du sable en grande quantité. Deux conditions doivent être réunies : un climat favorable à l’érosion des sols et une zone favorable au dépôt de sédiments. En général, lors des phases glaciaires, le volume des calottes glaciaires continentales augmente, le niveau de la mer baisse et le littoral recule. Les rivières parcourent alors de longues distances avant d’atteindre l’océan, ce qui accentue leur pouvoir érosif : ce contexte favorise la formation et le dépôt de sédiments sableux.
La dernière période glaciaire s’est terminée il y a un peu plus de 18 000 ans. Par exemple, dans le golfe de Gascogne, le niveau global de la mer était alors d’environ 120 m en dessous du niveau actuel. Depuis, la mer monte plus ou moins régulièrement. Il y a 14 000 ans son niveau était de -80 m par rapport à celui d’aujourd’hui et il y a 9 000 ans il était de -20 m. Depuis environ 5 000 ans, elle a plus ou moins cessé de remonter, limitant sérieusement les apports sédimentaires. Cet appauvrissement des derniers millénaires signifie que le stock de sable présent sur nos côtes ne se renouvelle plus. Malgré cela, elle est encore largement mobilisée par les activités humaines.
De graves conséquences environnementales
Comme mentionné ci-dessus, le secteur de la construction est le plus intensif en sable. En effet, celui-ci entre dans la composition du béton et du verre, mais il est aussi utilisé dans les remblais maritimes. Cependant, tous les sables ne conviennent pas à ces usages. Les grains du désert, par exemple, sont trop petits et ronds pour faire du béton. C’est pourquoi les sables continentaux, les rivières et les plages sont soumis à une telle pression. Mais ces perles précieuses se glissent aussi dans des objets plus inattendus. Par exemple, ils jouent un rôle central dans le processus de fabrication de nos ordinateurs, de nos cosmétiques ou encore de nos voitures.
Ces nombreuses applications impliquent des extractions massives. Le sable est extrait du sol dans des carrières, dragué du fond de l’océan ou gratté par des pelles mécaniques dans les rivières et le long de la côte. Autant de méthodes qui affectent la qualité de l’eau -augmentant la turbidité par exemple- de l’air et du sol. Ils modifient les paysages et les écosystèmes, affectant la biodiversité.
Ces prélèvements sur le milieu naturel peuvent également modifier le fonctionnement hydrologique des cours d’eau, la morphologie des côtes et les courants marins et, en particulier, provoquer l’érosion des sols et du littoral. Au risque d’exposer les populations à des risques plus importants d’inondation, de submersion marine et d’érosion.
objectif de trafic
Les conséquences potentielles de l’extraction du sable ne sont donc pas seulement environnementales, mais aussi économiques, humaines, sociales et culturelles. Par exemple, l’épuisement des sols et la disparition des plages affectent les secteurs agricole et touristique.
La demande de sable au Maroc a entraîné le développement d’industries illégales d’extraction de sable sur la côte, et l’extension de Singapour, principalement sur les digues marines, est source de tensions avec les pays voisins. En Inde, l’exploitation du sable pour ses minerais est également entachée d’illégalité et de corruption.
Bien sûr, son extraction n’est pas non plus sans impact sur le réchauffement climatique. Un rapport de l’OCDE de février 2019 indique que la production actuelle de béton est à l’origine de 9 % de toutes les émissions de gaz à effet de serre et projette ce chiffre à 12 % en 2060.
Sobriété, efficacité et matériaux alternatifs
Une autre étude, cette fois de l’ONU, également publiée en 2019, fait état de l’exploitation du sable à l’échelle mondiale. Par conséquent, il s’intéresse à la production de ciment dans 150 pays. Tenant compte du fait que le béton contient 25 % de sable et 45 % de sédiments grossiers par unité de volume, il conclut que les granulats (qui incluent les deux) sont les matériaux les plus exploités sur la planète.
En 2010, sa consommation mondiale annuelle, tous usages confondus, était estimée à 40 gigatonnes. En 2017, la production de béton a nécessité à elle seule 30 gigatonnes. Une quantité qui pourrait atteindre 50 gigatonnes par an en 2030, des chiffres qui dépassent largement les apports naturels des rivières. Compte tenu de la demande croissante de sable et des conséquences de son exploitation, ce rythme semble insoutenable. Comme pour l’énergie, la sobriété et l’efficacité feront partie de la solution.
Le rapport de l’ONU propose notamment de réduire la consommation de sable par l’utilisation de matériaux alternatifs, la densification urbaine ou encore l’investissement dans la rénovation et l’entretien des bâtiments existants, plutôt que la démolition et la reconstruction. Elle recommande également de privilégier le recyclage et l’innovation pour limiter les prélèvements dans le milieu naturel.