Cet article est publié dans le cadre de la prochaine Fête de la science qui se déroulera du 2 au 12 octobre en métropole et du 6 au 16 novembre à l’étranger et à l’international et dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et événements de votre région sur le site Fetedelascience.fr.
Les minéraux argileux sont l’une des premières ressources naturelles utilisées par l’espèce humaine. Ils ont accompagné le développement de nombreux domaines : logement, outillage, art, communication, santé, hygiène, matériaux. Un mélange d’argile, de sable et de paille hachée, appelé (adobe), est l’un des premiers matériaux de construction et est encore utilisé dans le monde entier.
Les argiles ont aussi grandement contribué au développement de la communication. Les Sumériens, les Babyloniens, les Assyriens et les Hittites remontent à 4000 av. J.-C. ils ont gravé leurs sceaux sur des tablettes d’argile à l’aide d’un roseau pointu et ils ont également constitué le premier support de l’écriture cunéiforme, un support recyclable. Séchées à l’air ou au soleil, ces tablettes brutes restaient cassantes ; un simple trempage dans l’eau permettait de les réutiliser. En revanche, après cuisson au four, elles purent être conservées, donnant ainsi naissance aux premières bibliothèques.
Leurs propriétés absorbantes en font également des matériaux de choix dans le domaine de la santé, sous forme de cataplasmes, de pansements à usage externe, ou encore de pansement gastrique. Les argiles entrent également dans la composition de nombreux produits cosmétiques (savons, masques, maquillage) ou sont appliquées directement comme dans le cas du ghassoul. Le ghassoul absorbe les corps gras ; les autres argiles peuvent contribuer à l’hydratation de la peau, sa purification, sa reminéralisation. L’action de l’argile peut également être antiseptique et cicatrisante.
La structure des minéraux argileux.
Les minéraux argileux existent depuis des millénaires dans l’histoire humaine, mais leur structure n’a été comprise que dans les années 1920, après l’invention des techniques de diffraction des rayons X.
La notion « d’argile » est utilisée pour nommer toutes les particules minérales inférieures à deux micromètres. Cette taille est de l’ordre de la résolution du microscope optique. Les cristaux de minéraux argileux sont donc très petits, et pour examiner leur structure en détail, il a fallu attendre le développement d’équipements à plus haute résolution. Il s’avère que la longueur des rayons X est à la même échelle que les distances entre les atomes dans les cristaux. Suite à la découverte du phénomène de diffraction des rayons X et de la relation entre la longueur d’onde des rayons X et la distance entre les atomes, il est devenu possible d’étudier la structure cristalline, y compris celle des minéraux argileux.
En 1927, le scientifique français Charles Maugin a déterminé avec une précision exacte la taille des mailles cristallines des micas et leur composition chimique. Puis, en 1930, le célèbre chimiste Linus Pauling fut le premier à résoudre les structures des minéraux argileux : talc, pyrophyllite, muscovite et chlorite. Par conséquent, nous connaissons maintenant la structure exacte de ces minuscules cristaux. Sa structure est composée de couches siliciques et magnésiennes ou alumineuses qui forment des feuillets qui s’empilent à leur tour pour former des cristaux laminaires. Les principaux éléments impliqués dans la structure des minéraux argileux sont Si, Al, Mg, O et H, mais de nombreux autres éléments tels que Fe, Ni et Zn peuvent être trouvés.
La grande variété des minéraux argileux tient à la possibilité de combiner ces éléments de plusieurs manières bien définies, notamment en substituant un élément à un autre au sein d’une feuille. Celle-ci, en revanche, conférera des propriétés particulières et très différentes selon la quantité et la position des substitutions dans la structure des minéraux argileux. Entre les couches, divers autres éléments tels que le sodium, le potassium ou même le calcium peuvent également être trouvés.
Imiter la nature : synthèse de minéraux argileux en laboratoire
Présentes sur la quasi-totalité de la surface de la Terre, les argiles ont des compositions et des propriétés qui dépendent des conditions géologiques dans lesquelles elles se sont formées. Pour une même argile, on peut observer des caractéristiques très diverses tant en termes de composition chimique, de coloration, de cristallinité, de nature des phases associées selon la nature du dépôt.
Ces hétérogénéités peuvent être un frein pour certaines applications industrielles dans lesquelles il est nécessaire d’utiliser des composés purs. Ainsi, des recherches ont commencé à synthétiser ces matériaux qui, dans des conditions géologiques, mettent plusieurs millions d’années à se former.
L’histoire de la synthèse du talc illustre comment les chercheurs sont parvenus à préparer du talc pur et l’évolution des méthodes de préparation vers des méthodes toujours plus douces.
Alors que les premiers essais de synthèse étaient réalisés à des températures proches de 1000°C et des pressions allant jusqu’à 2800 bars et pour des temps de cristallisation de quelques jours, il est désormais possible d’obtenir des talcs en quelques dizaines de secondes grâce à un procédé continu dans l’eau. supercritique – les propriétés de l’eau à l’état supercritique (au-dessus de 374°C et 218 bar) sont intermédiaires entre celles de l’état gazeux et liquide.
Outre le talc, d’autres minéraux argileux ont maintenant des analogues synthétiques. Les méthodes de préparation permettent, en plus du contrôle de la composition chimique, la modulation de la longueur des feuilles, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles applications.
Parmi les dernières voies de synthèse développées, il y a aussi la voie sol-gel qui permet la formation, à température et pression ambiantes et en une seule étape, de composés de type talc comprenant des groupements fonctionnels, évitant ainsi les traitements post-synthèse nécessaires..certaines propriétés aux matériaux.
Les minéraux argileux, des matériaux durables d’avenir
Les argiles utilisées depuis des millénaires sont des matériaux polyvalents. Développements actuels dans le domaine de l’environnement (piégeage des contaminants organiques et minéraux, catalyse, etc.) des matériaux multifonctionnels tels que les composites polymères argileux qui permettent, par exemple, de conférer des propriétés ignifuges. Les systèmes de libération contrôlée de molécules d’intérêt sous l’action d’un changement de pH, de la lumière ou d’un champ magnétique ouvrent la voie à de nouvelles applications dans le futur, notamment dans les applications biomédicales.
Ils connaissent également un regain d’intérêt pour le domaine de la construction avec, notamment, le renouvellement des techniques de construction en terre crue, apportant des propriétés thermiques et acoustiques sans générer aucune émission de Composés Organiques Volatils (COV), caractéristiques importantes tant dans la conception des logements respectant la certification HQE (Haute Qualité Energétique) et la réduction de la pollution de l’air intérieur. Enfin, la possibilité de préparer des argiles de composition chimique bien définie, par des synthèses respectueuses de l’environnement, élargit encore le champ des applications.